
I – QU’EST-CE QU’UNE VICTIME AU SENS PÉNAL ?
La victime est, en droit pénal, la personne, physique ou morale, qui a personnellement souffert du dommage causé par l’infraction.
Il existe des victimes directes mais également des victimes indirectes.
La victime est donc celle qui a subi un ou plusieurs préjudices découlant de l’infraction pénale.
En revanche la partie civile est le statut accordé à la victime qui décide d’agir dans le cadre de la procédure pénale pour demander réparation de son préjudice.
La constitution de partie civile permet d’exercer l’action civile devant la juridiction répressive et d’obtenir des dommages-intérêts ainsi que, le cas échéant,
Concrètement, une personne peut être victime d’une infraction pénal sans se constituer partie civile et donc sans solliciter l’indemnisation de ses préjudices.
II – LES DISPOSITIFS D’INDEMNISATION DES VICTIMES D’INFRACTIONS PÉNALES
2.1. L’INDEMNISATION DES VICTIMES PAR LE SARVI
Le service d’aide au recouvrement des victimes d’infractions (SARVI) a été créé pour aider au recouvrement des dommages-intérêts accordés par une juridiction pénale à une partie civile. Il s’agit d’un mécanisme géré par le Fonds de garantie (FGTI) qui verse une avance et poursuit ensuite le condamné.
2.1.1. Les victimes pouvant être indemnisées par le SARVI
Peuvent saisir le SARVI les personnes physiques qui se sont constituées partie civile, ont obtenu une décision pénale définitive accordant des dommages et intérêts et ne peuvent pas bénéficier d’une indemnisation par la CIVI.
Les victimes éligibles sont très souvent celles qui ont subi des préjudices corporels légers ou des dommages aux biens et qui se heurtent à la carence du débiteur condamné.
L’article 706-15-1 du Code de procédure pénale précise que le SARVI est applicable lorsque l’auteur de l’infraction fait l’objet d’une obligation d’indemnisation de la victime dans le cadre d’une peine de sanction-réparation, d’un sursis probatoire ou d’une décision d’aménagement de peine ou de libération conditionnelle.
2.1.2. La procédure pour être indemnisé par le SARVI
2.1.2.1. Les différentes étapes de la procédure
D’abord, la décision pénale doit être définitive. Vous ne pourrez par bénéficier du SARVI si un recours a été exercé à l’encontre de la décision qui vous a accordé des dommages-intérêts.
Ensuite, il faut que le condamné n’ait pas réglé les sommes dues dans un délai de deux mois suivant la date à laquelle la décision est devenue définitive, la victime peut saisir le SARVI.
La saisine du SARVI doit intervenir dans l’année.
Une fois saisi, le SARVI verse à la victime, dans les deux mois lorsque le dossier est complet, soit l’intégralité des sommes dues lorsque le montant alloué est inférieur ou égal à 1.000 euros, soit une avance de 30 % lorsque le montant est supérieur à 1.000 euros.
Le SARVI poursuit ensuite le condamné pour récupérer les sommes, assorties d’une pénalité, et reverse le cas échéant un complément à la victime en fonction des sommes effectivement recouvrées.
2.1.2.2. Les documents nécessaires
Votre dossier doit être complet.
Il comprend notamment le formulaire de demande, la copie exécutoire de la décision pénale, le certificat de non-appel, de non-opposition ou de non-pourvoi indiquant la date et le mode de signification, un justificatif d’identité, un RIB, et le cas échéant la décision de la CIVI et sa notification.
L’envoi peut se faire en ligne ou par voie postale.
Dans un arrêt rendu le 6 février 2014, la deuxième Chambre civile de la Cour de cassation a jugé que la saisine de la CIVI est subordonnée à l’absence de recours au SARVI. Autrement dit, on ne cumule pas SARVI et CIVI pour le même poste.
2.2. L’INDEMNISATION DES VICTIMES PAR LA CIVI
La commission d’indemnisation des victimes d’infractions pénales (CIVI) est une juridiction civile spécialisée, instituée dans le ressort de chaque tribunal judiciaire.
Elle statue à titre de solidarité nationale, en dehors de toute logique de faute prouvée du responsable, dès lors que les conditions légales sont réunies. Son cœur de mission est l’indemnisation intégrale des atteintes à la personne les plus graves ; elle peut aussi, sous conditions de ressources et de gravité, réparer certains préjudices matériels.
2.2.1. Les victimes pouvant être indemnisées par la CIVI
L’article 706-3 du Code de procédure pénale permet l’indemnisation intégrale des dommages résultant d’atteintes graves à la personne : décès, incapacité permanente, ou incapacité totale de travail d’une durée au moins égale à un mois. Ce texte vise aussi des infractions spécifiques comme les violences sexuelles ou la traite, indépendamment de la durée de l’incapacité totale de travail.
Pour les préjudices matériels, l’article 706-14 du Code de procédure pénale ouvre droit à une indemnité si la victime ne peut obtenir autrement une indemnisation effective et suffisante, se trouve de ce fait en situation matérielle ou psychologique grave, et si ses ressources n’excèdent pas le plafond de l’aide juridictionnelle partielle.
À peine de forclusion, la demande doit être présentée dans les trois ans à compter de la date de l’infraction. En cas de poursuites pénales, ce délai est prorogé et n’expire qu’un an après la décision définitive sur l’action publique ou l’action civile devant la juridiction répressive.
Depuis la loi du 20 novembre 2023, lorsque l’infraction est commise à l’encontre d’un mineur, le délai ne court qu’à compter de sa majorité.
2.2.2. La procédure pour être indemnisé par la CIVI
2.2.2.1. Les différentes étapes de la procédure
La procédure débute par une requête adressée à la CIVI territorialement compétente.
Le greffe transmet le dossier au Fonds de garantie (FGTI), qui instruit et formule une offre ; en cas d’accord, l’indemnisation est versée à l’amiable ; en cas de désaccord, la CIVI tranche.
2.2.2.2. Les documents nécessaires
Les pièces classiques comprennent les éléments liés à votre identié, la preuve de vos préjudices, les pièces pénales et tous éléments justificatifs de vos ressources.
2.3. L’INDÉMNISATION DES VICTIMES PAR LA JIVAT
La juridiction de l’indemnisation des victimes d’actes de terrorisme (JIVAT) est une juridiction civile spécialisée, siégeant au tribunal judiciaire de Paris.
Créée par la loi n° 2019-222 du 23 mars 2019, la JIVAT centralise le contentieux civil de l’indemnisation des victimes d’attentats et de leurs proches.
Les juridictions pénales sont donc incompétentes pour statuer sur l’indemnisation des dommages causés par un acte de terrorisme. Elles doivent obligatoirement renvoyer vers la JIVAT.
2.3.1. Les victimes pouvant être indemnisées par la JIVAT
Le régime d’indemnisation des victimes d’actes de terrorisme est régi par le Code des assurances. Sont indemnisés les victimes directes et leurs proches (victimes indirectes).
2.3.2. La procédure pour être indemnisé par la JIVAT
Le FGTI intervient à titre principal : il est saisi, instruit les demandes, propose une offre d’indemnisation, et, en cas de contestation, la JIVAT tranche.
SARVI – CIVI – JIVAT
Critères | SARVI | CIVI | JIVAT |
Nature du mécanisme | Aide au recouvrement des sommes allouées par un jugement pénal | Indemnisation par solidarité nationale (juridiction civile spécialisée) | Juridiction spécialisée (TJ de Paris) pour le contentieux du terrorisme |
Textes clés | Articles 706-15-1 et 706-15-2 du Code de procédure pénale | Articles 706-3 à 706-15 du Code de procédure pénale | Article L. 217-6 du Code de l’organisation judiciaire. Articles L. 126-1, et L. 422-1 à L. 422-6 du Code des assurances |
Conditions d’accès | Personne physique, décision définitive, absence d’éligibilité CIVI, impayé du condamné | Atteintes graves à la personne (réparation intégrale) ; et, sous conditions, dommages matériels et situations spécifiques | Victimes directes et indirectes d’actes de terrorisme |
Délais | Saisine dans l’année suivant la décision définitive ; attente de 2 mois après cette décision | 3 ans à compter des faits ; 1 an après décision pénale définitive ; mineur : délai courant à la majorité ; relevé de forclusion possible | Saisine du FGTI, puis saisine JIVAT en cas de désaccord ; règles spécifiques du Code des assurances |
Chaque dossier est unique et mérite une attention particulière. Il est fortement recommandé d’être assisté d’un avocat aguerri dans vos démarches d’indemnisation.