Le risque pénal lié aux poupées pédopornographiques

14 décembre 2025

I — C’EST QUOI UNE POUPÉE À CARACTÈRE PÉDOPORNOGRAPHIQUE ?

Parler de « poupées à caractère pédopornographique » n’a rien d’un effet de manche. Derrière ces mots, il y a des produits très concrets, que l’on peut voir, décrire, acheter en quelques clics et recevoir chez soi comme n’importe quel colis

Une poupée à caractère pédopornographique, au sens du droit français, est un objet conçu pour un usage sexuel qui représente un enfant ou une personne ayant l’apparence d’un enfant. Ce n’est pas un « style » marketing, c’est une qualification juridique : le produit incarne la « représentation d’un mineur à caractère pornographique » évoqué par l’article 227-23 du Code pénal.

Les dispositions de ce texte répressif s’appliquent également “aux images pornographiques d’une personne dont l’aspect physique est celui d’un mineur, sauf s’il est établi que cette personne était âgée de dix-huit ans au jour de la fixation ou de l’enregistrement de son image“.

Transposé à un produit, cela revient à examiner des critères objectifs : taille et proportions du corps, visage, absence de caractères pubères, accessoires scolaires, dénominations (« teen », « schoolgirl », « young »), mise en scène de l’innocence. Si ces éléments convergent, on se trouve face à une représentation de mineur.

La Cour de cassation a admis que l’infraction couvre aussi les images non réelles — dessins, animation, personnages imaginaires — dès lors que ces figures présentent les traits d’un enfant dans une situation pornographique. Un arrêt emblématique rendu le 12 septembre 2007 par la Chambre criminelle de la Cour de cassation rappelle ainsi que l’infraction est constituée peu important que le personnage soit réel, virtuel ou imaginaire : si « le personnage mis en scène […] présente les traits d’un mineur […] dans une situation pornographique ».

Au niveau européen, la directive 2011/93/UE du Parlement européen et du Conseil du 13 décembre 2011 relative à la lutte contre les abus sexuels et l’exploitation sexuelle des enfants, ainsi que la pédopornographie, qui harmonise les incriminations minimales, retient une définition de la pornographie enfantine couvrant aussi des « images réalistes représentant un mineur se livrant à un comportement sexuellement explicite ». Autrement dit, l’accent est mis sur la représentation sexualisée de l’enfance, pas sur l’existence d’un enfant réel.

Ainsi une « sex doll » à l’apparence enfantine, commercialisée comme telle, tombe dans le champ pénal. 

Il est important de noter que l’apposition de la mention « interdit aux moins de 18 ans » ne purge pas une représentation qui met en scène un personnage aux traits d’enfant dans une situation pornographique.

II — LE RISQUE PÉNAL LIÉ À L’ACHAT DE POUPÉES À CARACTÈRE PÉDOPORNOGRAPHIQUE

2.1. LE RISQUE PÉNAL POUR L’ACHETEUR

Du point de vue de l’acheteur, la règle est simple : « acquérir » ou « détenir » une représentation pédopornographique est un délit.

Conformément aux dispositions de l’article 227-23 du Code pénal, l’infraction est consommée par le fait “d’offrir, de rendre disponible ou de diffuser une telle image ou représentation, par quelque moyen que ce soit, de l’importer ou de l’exporter, de la faire importer ou de la faire exporter“. Ce délit est puni de cinq ans d’emprisonnement et de 75.000 euros d’amende.

L’article 38 du Code des douanes mentionne explicitement « les objets de toute nature comportant des images ou des représentations d’un mineur à caractère pornographique » au sens de l’article 227-23 du Code pénal.

2.2. LE RISQUE PÉNAL POUR LES PLATEFORMES DE VENTE

Les plateformes du type SHEIN ou ALIEXPRESS se présentent souvent comme de simples « hébergeurs ». Ce statut existe, et il limite leur responsabilité lorsqu’elles retirent promptement des contenus illicites signalés. Mais il s’est durci en matière de pédopornographie. Depuis la loi n° 2024-449 du 21 mai 2024, la loi pour la confiance dans l’économie numérique comporte un article 6-2-1 qui érige en délit le fait, pour un hébergeur, de ne pas retirer dans les vingt-quatre heures les images ou représentations de mineur à caractère pornographique visées par l’article 227-23 du Code pénal lorsqu’une demande de retrait lui a été adressée par l’autorité compétente au titre de l’article 6-1. La peine encourue est d’un an d’emprisonnement et 250.000 euros d’amende.

Le règlement (UE) 2022/2065, dit « Digital Services Act » impose à tous les intermédiaires un mécanisme efficace de signalement et d’action, la coopération avec des signaleurs de confiance, des procédures de retrait et d’information des utilisateurs, et, pour les très grandes plateformes, une gestion proportionnée des risques systémiques. Autrement dit, si une marketplace tolère des fiches qui promeuvent ou vendent des poupées à caractère pédopornographique, elle s’expose à la fois à des pénalités européennes et à des poursuites en France, notamment en cas de défaut de retrait sous 24 heures après injonction.

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Que vous soyez acheteur ou vendeur d’une poupée à caractère pédopornographique, il est essentiel de prendre connaissance du risque pénal lié à votre comportement. Si des poursuites sont engagées à votre encontre, il est indispensable de contacter sans délai un avocat spécialiste en droit pénal afin de bénéficier d’une défense pénale de qualité.

Doranges Avocat
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