
En tant que spécialiste en droit pénal, notre cabinet d’avocats assure la défense des personnes mises en examen et notamment celles qui sont placées en détention provisoire.
Se pose régulièrement la question de savoir le sort du contrat de travail du salarié placé en détention provisoire.
Autrement dit, est-ce que le fait pour un salarié d’être placé en détention provisoire entraine nécessairement la rupture de son contrat de travail ?
I – LA DÉTENTION PROVISOIRE DU SALARIÉ
La détention provisoire est une mesure privative de liberté par les articles 143-1 à 148-8 du Code de procédure pénale.
La détention provisoire, qui n’est ni une sanction, ni une déclaration de culpabilité, est ordonnée soit par le Juge des Libertés et de la Détention, soit par le Tribunal Correctionnel dans le cadre d’une procédure de comparution immédiate.
Un salarié à qui il est reproché d’avoir commis une ou plusieurs infractions pénales peut donc, dans les conditions de l’article 144 du Code de procédure pénale, être placé en détention provisoire.
Pour en savoir davantage sur la détention provisoire, vous pouvez lire ici notre article qui y est consacré.
II – LES CONSÉQUENCES DE LA DÉTENTION PROVISOIRE SUR LE CONTRAT DE TRAVAIL
2.1. LA SUSPENSION DU CONTRAT DE TRAVAIL DU SALARIÉ DÉTENU
La détention provisoire du salarié rend impossible l’exécution de l’activité professionnelle. Elle conduit donc à la suspension du contrat de travail ce qui a pour conséquences, sauf dispositions conventionnelles contraires, de priver le salarié de sa rémunération.
Cette suspension n’est pas une sanction de l’employeur mais résulte d’un empêchement involontaire et temporaire du salarié d’exécuter le contrat de travail.
Bien qu’aucune disposition spécifique du Code du travail ne traite explicitement de la détention provisoire du salarié, la Chambre Sociale de la Cour de cassation l’assimile à d’autres cas d’empêchement tel que la maladie.
2.2. LE LICENCIEMENT DU SALARIÉ DÉTENU
Dans un arrêt rendu le 26 février 2003, la Chambre Sociale de la Cour de cassation a rappelé que “le placement d’un salarié en détention provisoire, alors qu’il est présumé innocent, entraîne la suspension du contrat de travail” et précisé que dès lors que “le comportement incriminé du salarié était intervenu en dehors du travail et n’avait aucun lien avec l’activité professionnelle et que l’incarcération du salarié n’avait entraîné aucun trouble dans l’organisation et le fonctionnement de l’entreprise […] ce fait de vie personnelle ne constituait pas une cause réelle et sérieuse de licenciement“.
Nous traitons ici de la seule détention provisoire du salarié. En effet, la solution est différente lorsque l’incarcération du salarié est liée à une condamnation définitive prononcée à l’encontre de ce dernier.
Dans un arrêt rendu le 3 avril 2001, la Chambre Sociale de la Cour de Cassation a précisé que l’incarcération d’un salarié liée à une condamnation définitive ne constitue pas un cas de force majeure autorisant l’employeur à prendre acte de la rupture du contrat de travail.
Le licenciement d’un salarié en raison de son incarcération s’analyse donc comme un licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Le placement en détention provisoire ne constitue pas une faute disciplinaire. En effet, le principe de la présomption d’innocence interdit à l’employeur de fonder une quelconque sanction sur le seul placement en détention provisoire du salarié.
Faut-il en conclure qu’un employeur ne peut jamais licencier son salarié placé en détention provisoire ?
L’employeur peut procéder au licenciement de son salarié placé en détention provisoire lorsqu’il se trouve dans l’une de ces situations :
- l’absence du salarié n’est pas justifiée ou le salarié invoque un motif fallacieux concernant son absence. Dans un arrêt rendu le 29 septembre 2014, la Chambre Sociale de la Cour de cassation a ainsi jugé que le fait pour un salarié de dissimuler sa mise en examen constitue un manquement à la loyauté à laquelle il est tenu envers son employeur ce qui peut justifier un licenciement.
- l’absence prolongée du salarié perturbe le bon fonctionnement de l’entreprise et impose son remplacement définitif. Dans un arrêt rendu le 20 mai 2015, la Chambre Sociale de la Cour de cassation a ainsi considéré que le licenciement d’un salarié placé en détention provisoire était valable dès lors que “le salarié n’avait fait aucune démarche pour aviser son employeur de sa situation dans le délai d’un mois qui s’était écoulé entre son placement en garde à vue et son licenciement, qu’il n’apportait pas la preuve qu’il lui était impossible de contacter son employeur de son lieu d’incarcération et que cette carence avait désorganisé le fonctionnement de l’entreprise“ ;
- le placement en détention provisoire du salarié porte une atteinte sérieuse à l’image de l’entreprise.
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