Les avocats et notamment les avocats pénalistes sont souvent représentés dans les fictions – séries et films – comme des figures charismatiques, héroïques et dotées d’une éloquence inégalée. Ces représentations, bien que captivantes, sont souvent éloignées de la réalité des pratiques judiciaires. En matière pénale, les avocats jouent un rôle essentiel dans la défense des droits et libertés des personnes mais leur quotidien est bien plus complexe et moins glamour que ce que la fiction laisse entrevoir.
Il nous semblait utile d’analyser les différences existant entre un véritable avocat pénaliste et les personnages des avocats représentés dans les fictions. Nous avons décidé de centrer notre analyse sur trois séries : Engrenages, Suits, et 66-5
I – L’IMAGE DE L’AVOCAT PÉNALISTE DANS LES SÉRIES
1.1. Le charisme et l’éloquence de l’avocat pénaliste : mythe ou réalité ?
Dans les séries, les avocats sont souvent dépeints comme des orateurs brillants capables de convaincre un jury ou un juge avec des arguments percutants et des punchlines mémorables. Par exemple, Harvey Specter, personnage principal et emblématique de la série Suits, impressionne par son assurance et sa capacité à retourner n’importe quelle situation à son avantage grâce à son charisme.
En réalité, bien que l’éloquence soit un atout indéniable pour un avocat pénaliste, elle n’est pas suffisante. La plaidoirie, bien qu’importante, n’est qu’une partie du travail de l’avocat pénaliste.
En France, les audiences correctionnelles ou criminelles sont souvent marquées par un ton plus factuel et moins spectaculaire que dans les séries américaines. Par ailleurs, le rôle de l’avocat pénaliste consiste aussi à analyser des dossiers complexes, préparer des conclusions écrites et assurer une stratégie de défense sur le long terme.
AInsi, un avocat pénaliste défendant devant la Cour d’assises une personne accusée de meurtre doit, bien avant l’audience criminelle, maîtriser le dossier de la procédure et doit avoir préparer efficacement son client.
Si le charisme et l’éloquence de l’avocat pénaliste constituent des atouts indéniables lors de l’audience, ils ne sont pas les seuls atouts de ce technicien du droit pénal.
1.2. Les relations entre l’avocat pénaliste et ses clients : la fiction face à la réalité
Dans la série 66-5, l’avocate Roxane Bauer défend ses clients dans des affaires pénales sensibles, tout en naviguant dans des relations personnelles complexes. Les scénarios mettent souvent en scène des interactions chargées d’émotion entre l’avocat et son client.
Dans la réalité, il peut arriver que les avocats pénalistes entretiennent des relations étroites avec leurs clients, particulièrement dans les affaires pénales graves. Toutefois, ces relations sont strictement encadrées par les principes essentiels de la profession d’avocat et par la déontologie. En effet, l’avocat pénaliste se doit d’avoir le recul nécessaire pour défendre efficacement ses clients.
La relation entre l’avocat pénaliste et ses clients repose sur la confiance et non sur des interactions dramatiques comme on peut le voir dans les séries.
Lorsqu’il intervient en garde à vue, l’avocat pénaliste doit s’assurer que son client comprend l’infraction qui lui est reprochée et doit le conseiller utilement. Cela nécessite plus de patience et de pédagogie que de scènes émotionnelles comme dans les séries.
En outre, et contrairement à ce qui est montré dans les séries, l’avocat dispose d’un entretien confidentiel avec son client pour une durée maximale de trente minutes et, lors des auditions, ce n’est pas lui qui répond aux lieu et place de son client.
1.3. La représentation du procès pénal
Dans des séries comme Engrenages, les scènes de procès sont souvent tendues, avec des échanges verbaux intenses entre l’avocat de la défense, le procureur de la République et le juge. Ces moments dramatiques captivent le spectateur.
Dans la réalité, les procès correctionnels sont bien moins théâtraux.
Les avocats et les magistrats respectent leur déontologie et les plaidoiries sont rarement aussi passionnées. La dynamique entre les différents acteurs du procès pénal est plus codifiée et moins conflictuelle que dans les séries.
Contrairement aux séries, le respect du principe du contradictoire fait qu’il n’y a pas de révélations spectaculaires ou preuves invoquées par surprise. Cela ne signifie pas qu’il ne peut pas y avoir de renversement de situation.
Dans les séries, les affaires sont résolues assez rapidement et le temps est relativement bref entre la commission de l’infraction et l’audience de jugement. Dans la réalité, le temps judiciaire est un temps long et il peut se passer plusieurs années entre le dépôt de plainte et la date de l’audience pénale.
II – LES CLICHÉS SUR L’AVOCAT PÉNALISTE VÉHICULÉS PAR LES SÉRIES
2.1. Le cliché de l’avocat héros
Dans des séries comme Suits, l’avocat est souvent présenté comme un sauveur capable de résoudre, à lui seul, des affaires particulièrement complexes.
Dans la réalité, l’avocat pénaliste s’appuie sur différents intervenants – les experts notamment – pour parvenir à une solution. Dans certaines affaires, l’avocat pénaliste peut également collaborer avec des avocats d’autres spécialités.
L’avocat pénaliste n’est ni un héros, ni un enquêteur. Il est un auxiliaire de justice qui par sa combativité et sa détermination apporte sa pierre à l’édifice de la manifestation de la vérité.
2.2. La vie glamour des avocats
Dans les séries, les avocats sont souvent montrés dans des cabinets luxueux, conduisant des voitures de luxe et menant une vie trépidante.
La réalité est bien différentes, notamment en France. Nombreux les avocats intervenant en matière pénale qui doivent composer avec des revenus modestes. Les honoraires des avocats pénalistes français sont, de manière générale, moins élevés que ceux des avocats aux États-Unis. En outre, de nombreux avocats acceptent de défendre les personnes les moins aisés au titre de l’aide juridictionnelle.
Le quotidien des avocats pénalistes est marqué par des heures de travail au cabinet, par des déplacements fréquents et par des heures d’attente en audience.
2.3. L’accès immédiat à des preuves ou à des témoins
Dans la série Engrenages, les avocats ont parfois un accès direct à des preuves ou à des témoins essentiels.
La réalité est bien différente puisque les avocats n’ont pas la possibilité de “découvrir” des preuves par eux-mêmes puisque tout passe par le cadre de l’enquête ou de l’instruction.
III – LES ASPECTS RÉALISTES DE L’AVOCAT PÉNALISTE DANS LES SÉRIES
Dans la série 66-5, on perçoit la complexité émotionnelle d’une avocate confrontée à des affaires impliquant des drames humains. Cet aspect est très proche de la réalité. Un avocat pénaliste est souvent exposé à des affaires difficiles, comme des violences conjugales, des homicides ou des infractions sexuelles commis envers des mineurs.
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De manière générale les séries et les films – qu’ils soient américains ou français – offrent une vision romancée du métier d’avocat, souvent loin de la réalité des tribunaux. Si ces fictions mettent en lumière certaines facettes de la profession d’avocat pénaliste, comme l’importance de la stratégie et de l’éloquence, elles passent sous silence le travail minutieux et parfois ingrat du quotidien de ces avocats. La réalité est souvent moins glamour, mais tout aussi passionnante pour qui s’intéresse à la défense des droits fondamentaux.
Ce contraste entre fiction et réalité rappelle l’importance de mieux comprendre le système judiciaire et le rôle crucial que jouent les avocats pénalistes dans la société.
Si vous souhaitez avoir une approche plus réaliste – mais tout aussi pédagogique – de la profession d’avocat pénaliste, nous vous recommandons fortement de regarder notre série Youtube “On a tous besoin d’un avocat pénaliste“.