Comprendre la conduite après usage de stupéfiants en deux minutes

I – DÉFINITION DU DÉLIT DE CONDUITE APRÈS USAGE DE PRODUITS STUPÉFIANTS 

1.1 LE CADRE JURIDIQUE DE L’INFRACTION

La conduite après usage de produits stupéfiants est une infraction pénale. En effet, l’article L.235-1 du Code de la route sanctionne “toute personne qui conduit un véhicule ou qui accompagne un élève conducteur alors qu’il résulte d’une analyse sanguine ou salivaire qu’elle a fait usage de substances ou plantes classées comme stupéfiant“.

Contrairement à une idée reçue, il n’est pas nécessaire de démontrer une altération des capacités de conduite, comme c’est le cas pour l’alcoolémie où un seuil légal est fixé. La simple présence, dans l’organisme, d’une substance classée comme stupéfiant suffit à caractériser l’élément matériel de l’infraction.

Un conducteur peut donc être reconnu coupable même si la prise de stupéfiants est ancienne et n’a plus d’effet psychotrope perceptible au moment du contrôle.

1.2 LES SUBSTANCES CONCERNÉES PAR L’INFRACTION

Les produits stupéfiants au sens de la loi française recouvrent une large variété de substances. L’article R.5132-86 du Code de la santé publique établit la liste des plantes et substances classées comme stupéfiants, actualisée régulièrement par arrêté ministériel.

Cette liste inclut notamment le cannabis et ses dérivés (THC), la cocaïne, les opiacés (héroïne, morphine), les amphétamines, le LSD, la MDMA (ecstasy), ainsi que de nombreuses substances de synthèse.

Le cannabis, sous toutes ses formes, est le produit le plus souvent impliqué dans les contrôles positifs. Sa molécule psychoactive principale, le tétrahydrocannabinol (THC), est détectable plusieurs jours, voire plusieurs semaines, après la consommation, en particulier chez les consommateurs réguliers. Ce délai de détection explique qu’un conducteur puisse être sanctionné bien après la disparition des effets subjectifs.

II – LES DROITS DU CONDUCTEUR DANS LE CADRE DU DÉPISTAGE

2.1 LE DÉPISTAGE DES PRODUITS STUPÉFIANTS

2.1.1 Le dépistage par tests salivaires

Le contrôle de l’usage de stupéfiants débute généralement par un test salivaire qui est un dépistage rapide permettant de détecter la présence de plusieurs familles de stupéfiants.

L’article R.235-6 du Code de la route dispose ainsi que “le prélèvement salivaire est effectué par un officier ou agent de police judiciaire de la gendarmerie ou de la police nationales territorialement compétent à l’aide d’un nécessaire, en se conformant aux méthodes et conditions prescrites par l’arrêté prévu à l’article R.235-4.

2.1.2 Le dépistage par analyses sanguines

Il est prévu à l’article R.235-6 du Code de la route qu’à la suite du test salivaire, le fonctionnaire de police ou de gendarmerie doit demander au conducteur s’il souhaite “se réserver la possibilité de demander l’examen technique ou l’expertise prévus par l’article R. 235-11 ou la recherche de l’usage des médicaments psychoactifs prévus au même article“.

Si le conducteur répond par la positive, il est alors procédé à un prélèvement sanguin par un médecin, par un infirmier ou par un biologiste.

Il n’est pas nécessaire que le conducteur soit assisté d’un avocat pour renoncer au prélèvement sanguin.

III – LES SANCTIONS ENCOURUES EN CAS DE CONDUITE APRÈS USAGE DE PRODUITS STUPÉFIANTS 

3.1 LES SANCTIONS PÉNALES

Depuis la loi n°2025-622 du 9 juillet 2025 créant l’homicide routier et visant à lutter contre la violence routière, le délit de conduite après usage de produits stupéfiants est puni de trois ans d’emprisonnement et de 9.000 euros d’amende.

L’article L.235-1 du Code de la route prévoit néanmoins que “si la personne se trouvait également sous l’empire d’un état alcoolique caractérisé par une concentration d’alcool dans le sang ou dans l’air expiré égale ou supérieure aux taux fixés par les dispositions législatives ou réglementaires du présent code, les peines sont portées à cinq ans d’emprisonnement et 15 000 euros d’amende.

En cas de conduite après usage de produits stupéfiants, vous encourez également les peines complémentaires suivantes :

  • la suspension de votre permis de conduire pour une durée maximale de cinq ans au plus ;
  • l’annulation de votre permis de conduire avec interdiction de solliciter la délivrance d’un nouveau permis de conduire pendant une durée maximale de cinq ans ;
  • la peine de travail d’intérêt général ;
  • la peine de jours-amende ;
  • l’interdiction de conduire certains véhicules terrestres à moteur, y compris ceux pour la conduite desquels le permis de conduire n’est pas exigé, pour une durée maximale de cinq ans ;
  • l’obligation d’accomplir, à vos frais, un stage de sensibilisation à la sécurité routière ;
  • l’obligation d’accomplir, à vos frais, un stage de sensibilisation aux dangers de l’usage de produits stupéfiants ;
  • la confiscation du véhicule dont vous vous êtes servi pour commettre le délit si vous en être le propriétaire.

3.2 LES SANCTIONS ADMINISTRATIVES

Outre les sanctions pénales, vous encourez également des sanctions administratives à savoir la suspension de votre permis de conduire par le Préfet mais également un retrait de points sur votre permis de conduire.

Le délit de conduite après usage de produits stupéfiants entraine de plein droit le retrait de six points sur votre permis de conduire.

En cas de conduite après usage de produits stupéfiants cumulée et sous l’empire d’un état alcoolique, huit points seront retirés de votre permis de conduire.

IV – FOCUS SUR LA CONDUITE APRÈS CONSOMMATION DE CBD

4.1 DÉFINITION ET STATUT JURIDIQUE DE CBD

Le CBD (cannabidiol) est un constituant du cannabis dépourvu d’effet psychotrope significatif et distinct du tétrahydrocannabino. Le CBD n’est pas classé comme stupéfiant, sous réserve de respecter des conditions strictes fixées par l’arrêté du 30 décembre 2021, notamment une teneur en THC inférieure à 0,3 %. Toutefois, la présence de THC dans l’organisme, même à l’état de traces résiduelles issues d’un produit CBD légal, suffit à caractériser le délit de conduite après usage de produits stupéfiants.

Dans un arrêt rendu le 29 décembre 2022, le Conseil d’État a définitivement annulé l’arrêté qui interdisait la vente des fleurs et feuilles de cannabis à faible teneur en THC. Le Conseil d’État a en effet relevé que le CBD ne présente ni effet psychotrope ni risque avéré de dépendance et que l’interdiction n’était pas proportionnée à l’objectif de santé publique poursuivi.

4.2 LA SANCTION EN CAS DE CONDUITE APRÈS USAGE DE CBD 

L’infraction de l’article L235-1 du Code de la route est constituée par la seule présence d’un stupéfiant dans l’organisme du conducteur, indépendamment de toute altération des capacités du conducteur.

La présence de THC, même à l’état de traces, suffit, dès lors qu’elle est légalement établie par une analyse biologique de confirmation. Cette logique s’applique quelle que soit l’origine du THC détecté.

Le conducteur qui a consommé un produit de CBD licitement commercialisé reste exposé à une condamnation si le dépistage salivaire, confirmé par l’analyse sanguine, révèle du THC.

Plusieurs tribunaux correctionnels ont ainsi rappelé que la bonne foi du conducteur liée à l’usage de CBD n’écarte pas l’élément légal de l’infraction, la norme routière visant l’usage d’un stupéfiant et non l’effet subjectif ressenti.

4.3 LA POSITION DE LA COUR DE JUSTICE DE L’UNION EUROPÉENNE  

Dans son arrêt rendu le 19 novembre 2020 rendu dans l’affaire C‑663/18, dit « Kanavape », la Cour de justice de l’Union européenne a jugé que les articles 34 et 36 du Traité sur le fonctionnement de l’Union Européenne, interprétés à la lumière de la qualification du CBD en droit de l’Union, s’opposent à une réglementation nationale interdisant la commercialisation du cannabidiol légalement produit dans un autre État membre lorsqu’il est extrait de la plante dans son intégralité et non de ses seules fibres et graines, sauf justification proportionnée par un objectif de santé publique.

Cet arrêt de la CJUE confirme la licéité du marché du CBD sous conditions, tandis que l’article L.235-1 du Code de la route continue de sanctionner la conduite en présence de THC, sans considération de l’origine de ce THC.

Autrement dit, la conduite après usage de stupéfiants s’applique que le conducteur est consommé du cannabis, ou tout autre produits stupéfiants, ou du CBD.

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Le délit de conduite après usage de produits stupéfiants ne laisse aucune place à la tolérance, puisque la seule présence de THC, même à l’état de trace, suffit à caractériser l’infraction. Cela concerne aussi bien la consommation de cannabis que celle de certains produits à base de CBD pourtant autorisés à la vente.

Dans un arrêt rendu le 9 avril 2025, la Chambre Criminelle de la Cour de cassation a jugé que le défaut de seuil légal permettant de retenir le délit de conduite après usage de stupéfiants n’est pas contraire au principe d’égalité quand bien même il existerait un tel seuil pour établir le délit de conduite sous l’empire d’un état alcoolique.

Face aux enjeux importants, il est essentiel de se faire assister par un avocat spécialiste en droit pénal.

Doranges Avocat
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