
I – C’EST QUOI LE CODE DE DÉVERROUILLAGE D’UN TÉLÉPHONE ?
Le code de déverrouillage de votre téléphone constitue la première ligne de protection de votre vie numérique. Il ne s’agit pas seulement d’un outil d’accès : c’est un verrou technologique qui conditionne l’accès à une masse d’informations personnelles et parfois sensibles contenues dans votre téléphone.
Il peut s’agir d’un code PIN, d’un mot de passe alphanumérique, d’un schéma graphique ou encore d’une authentification biométrique (empreinte digitale, reconnaissance faciale, scanner d’iris). Quel que soit son format, il a pour finalité d’empêcher toute intrusion non autorisée.
Lorsque vous êtes soupçonné d’avoir commis une infraction, le code de déverrouillage de votre téléphone devient un enjeu probatoire. En effet son accès permettrait potentiellement d’établir votre culpabilité.
II – LE POSSIBLE REFUS DE DONNER SON CODE LORS D’UN CONTRÔLE DE POLICE
Dans la rue, sur la route ou à proximité de lieux publics sensibles, les forces de l’ordre procèdent régulièrement à des contrôles d’identité. Ces contrôles, qui sont encadrés par les dispositions de l’article 78-2 du Code de procédure pénale permettent de vérifier l’identité de la personne, mais pas d’opérer une fouille de ses effets personnels sans son consentement ou circonstance exceptionnelle.
Autrement dit, un simple contrôle de police ne permet d’exiger ni la remise du téléphone, ni le code de déverrouillage. Retenez en effet qu’en l’absence de réquisition judiciaire, le fonctionnaire de police ou de gendarmerie ne peut exiger votre code de déverrouillage de votre téléphone.
III – L’OBLIGATION DE DONNER SON CODE DE DÉVERROUILLAGE EN GARDE À VUE
La garde à vue est une mesure de privation de liberté imposée à une personne soupçonnée d’avoir commis ou tenté de commettre une infraction punie d’une peine d’emprisonnement.
Issu d’une loi du 3 juin 2016, l’article 434-15-2 du Code pénal en cadre la question de l’obligation de remettre son code de déverrouillage.
” Est puni de trois ans d’emprisonnement et de 270 000 € d’amende le fait, pour quiconque ayant connaissance de la convention secrète de déchiffrement d’un moyen de cryptologie susceptible d’avoir été utilisé pour préparer, faciliter ou commettre un crime ou un délit, de refuser de remettre ladite convention aux autorités judiciaires ou de la mettre en oeuvre, sur les réquisitions de ces autorités délivrées en application des titres II et III du livre Ier du code de procédure pénale.
Si le refus est opposé alors que la remise ou la mise en oeuvre de la convention aurait permis d’éviter la commission d’un crime ou d’un délit ou d’en limiter les effets, la peine est portée à cinq ans d’emprisonnement et à 450 000 € d’amende”.
Cet article ne vise que les cas dans lesquels les données du téléphone sont chiffrées et que le code de déverrouillage est assimilable à une “convention secrète de déchiffrement”.
Autrement dit, refuser de donner un code qui ne protège pas un système de cryptologie (chiffrement des données) ne tombe pas sous le coup de cette infraction. Il est donc essentiel de vérifier si le téléphone est chiffré (c’est généralement le cas sur les iPhones ou les téléphones Android récents).
Il y a donc trois conditions cumulatives pour que les dispositions de l’article 434-15-2 du Code pénal s’appliquent :
- le téléphone utilise effectivement un système de cryptologie. Si le téléphone est simplement verrouillé sans dispositif de chiffrement actif, l’article 434-15-2 du Code pénal ne s’applique pas.
- l’individu a connaissance du code ;
- le téléphone est susceptible d’avoir été utilisé pour la commission ou la préparation d’un crime ou d’un délit.
Dans sa décision DC n°2018-696 QPC du 30 mars 2018, le Conseil Constitutionnel a considéré qu’était conforme à la Constitution le délit de refus de remise d’une convention de déchiffrement d’un moyen de cryptologie, c’est-à-dire le fait de refuser de transmettre le code de déverrouillage de son téléphone.
IV – L’OBLIGATION DU MIS EN EXAMEN DE DONNER SON CODE DE DÉVERROUILLAGE
Une personne mise en examen peut être sollicitée par le juge d’instruction pour remettre le code d’accès à son téléphone. Dans cette phase, l’enquête est conduite sous l’autorité d’un magistrat, et les perquisitions numériques sont encadrées par les articles 56-1 et suivants du Code de procédure pénale.
La jurisprudence admet que le juge d’instruction peut demander la communication du code dans les conditions posées par l’article 434-15-2 du Code pénal, et cela même en présence d’un avocat.
V – L’UTILISATION DU TÉLÉPHONE DÉVERROUILLÉ PAR LES ENQUÊTEURS
Une fois le téléphone déverrouillé, les enquêteurs peuvent accéder à une large palette de données numériques. Ces éléments peuvent faire l’objet d’une saisie, d’une exploitation, d’une copie, voire d’un croisement avec d’autres fichiers.
Les informations consultables sont notamment :
- les messages échangés par SMS ou MMS ;
- les échanges sur les applications (WhatsApp, Signal, Telegram) ;
- les historiques d’appels ;
- les contacts ;
- les photos, vidéos, fichiers stockés dans le téléphone ;
- les documents au format PDF, Word ou Excel ;
- les historiques de navigation Internet ;
- les données de localisation GPS ;
- les éléments synchronisés.