Comprendre le détournement de fonds publics en deux minutes

I – DÉFINITION DU DÉLIT DE DÉTOURNEMENT DE FONDS PUBLICS

Illustré récemment l’affaire des assistants parlementaires du Rassemblement National, le détournement de fonds publics est un délit prévu à l’article 432-15 du Code pénal.

Le détournement de fonds publics peut s’analyser comme étant, pour des personnes exerçant une fonction publique, un manquement à leur devoir de probité. Il s’agit d’une atteinte à l’administration publique et donc une atteinte à l’autorité de l’État.

L’article 432-15 du Code pénal définit le détournement de fonds publics comme “le fait, par une personne dépositaire de l’autorité publique ou chargée d’une mission de service public, un comptable public, un dépositaire public ou l’un de ses subordonnés, de détruire, détourner ou soustraire un acte ou un titre, ou des fonds publics ou privés, ou effets, pièces ou titres en tenant lieu, ou tout autre objet qui lui a été remis en raison de ses fonctions ou de sa mission“.

Cette disposition vise à sanctionner les personnes exerçant une fonction publique et qui utilisent à des fins personnelles ou détournent de leur objet initial les fonds ou biens qui leur sont confiés dans le cadre de leurs fonctions.​

Cette infraction n’est pas sans rappeler le délit d’abus de biens sociaux ainsi que le délit d’abus de confiance.

En sanctionnant le détournement de fonds publics, le législateur entend maintenir la confiance des citoyens dans la gestion des affaires publiques.​

II – LES ÉLÉMENTS CONSTITUTIFS DU DÉLIT DE DÉTOURNEMENT DE FONDS PUBLICS

Pour qu’un comportement puisse être qualifié comme un détournement de fonds publics, plusieurs éléments doivent être réunis.

L’infraction ne peut être commise que par certaines personnes :​

  • les personnes dépositaires de l’autorité publique ;
  • les personnes chargées d’une mission de service public. ;
  • les comptables publics ;
  • les dépositaires publics ou leurs subordonnés.​

Cette qualité est essentielle pour la caractérisation de l’infraction. ​

L’objet du détournement doit concerner des fonds publics ou privés, ou d’autres biens tels que des actes, titres, effets, pièces ou objets remis à la personne en raison de ses fonctions ou de sa mission.

La personne doit avoir accompli un acte de destruction, de détournement ou de soustraction des biens en question. Le détournement implique une utilisation des fonds ou biens à des fins autres que celles pour lesquelles ils ont été remis.  ​

Si les fonds ou les biens ont été remis à la personne pour des raisons étrangères aux fonctions ou à la mission qu’elle exerce, alors l’infraction ne sera pas caractérisée.

III – LES SANCTIONS ENCOURUES EN CAS DE DÉTOURNEMENT DE FONDS PUBLICS

Le détournement de fonds publics est un délit puni, à titre principal, de dix ans d’emprisonnement et d’une amende d’un million d’euros. Le montant de l’amende peut être porté au double du produit de l’infraction.

Lorsque le détournement de fonds publics est commis en bande organisée, la peine d’amende est portée à deux millions d’euros ou, s’il excède ce montant, au double du produit de l’infraction.

Il convient néanmoins de préciser que, conformément aux dispositions de l’article 432-16 du Code pénal, lorsque le détournement de fonds publics résulte de la négligence de la personne exerçant des fonctions publiques ou une mission de service public, la peine encourue est d’un an d’emprisonnement et de 15.000 euros d’amende.

Outre les peines encourues à titre principal, la personne reconnu coupable de détournement de fonds publics encourt également des peines complémentaires.

L’article 432-17 du Code pénal prévoit les peines complémentaires suivantes : 

  • l’interdiction des droits civils, civiques et de famille. Comme prévu par l’article 131-26 du Code pénal, cette peine complémentaire porte notamment sur le droit de vote, l’éligibilité, le droit de témoigner en justice. L’inéligibilité emporte interdiction ou incapacité d’exercer une fonction publique.
  • l’interdiction d’exercer l”activité professionnelle ou sociale dans l’exercice ou à l’occasion de l’exercice de laquelle l’infraction a été commise ;
  • la confiscation des biens ayant servi à commettre l’infraction ou qui en sont le produit. ;
  • l’affichage ou la diffusion de la décision de condamnation.

Il convient de rappeler que, conformément aux dispositions de l’article 131-26-2 du Code pénal, le prononcé de la peine complémentaire d’inéligibilité est obligatoire à l’encontre de toute personne coupable d’un délit de détournement de fonds publics.

Cette condamnation est mentionnée au bulletin n°2 du casier judiciaire pendant toute la durée de l’inéligibilité.

Au mois de mai 2022, François FILLON, ancien premier ministre et ancien député, a été reconnu coupable notamment de détournement de fonds publics par la Chambre des appels correctionnels de la Cour d’appel de Paris. Il a été condamné à une peine de quatre ans d’emprisonnement dont trois années avec sursis, à 375.000 euros d’amende et à dix ans d’inéligibilité. La culpabilité de François FILLON est définitivement établie dès lors que dans son arrêt du 24 avril 2024, la Chambre Criminelle de la Cour de Cassation a rejeté le pourvoi formé par ce dernier contre l’arrêt rendu par la Cour d’appel de Paris. Si un autre procès aura bien lieu ce ne sera que sur la question de la peine prononcée à l’encontre de Monsieur FILLON.

Au mois de mars 2025, Marine LE PEN, ancienne présidente du Rassemblement National, a été reconnue coupable de détournement de fonds publics par le Tribunal Correctionnel de Paris. Il lui était reproché d’avoir utilisé des fonds du Parlement européen pour rémunérer des assistants parlementaires qui, en réalité, travaillaient pour le parti en France. Le tribunal a estimé que cette utilisation des fonds européens constituait un détournement de fonds publics. Marine LE PEN a été condamnée à quatre ans de prison, dont deux ans ferme, 100 000 euros d’amende et cinq ans d’inéligibilité avec exécution provisoire. Il convient de préciser que Madame LE PEN a interjeté appel de cette décision et devrait, semble-t-il, être jugée devant la Chambre des appels correctionnels de la Cour d’appel de Paris au début de l’année 2026. Sa culpabilité n’est donc pas définitivement établie à ce jour.

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Vous êtes poursuivi pour détournement de fonds publics ? Au regard des risques encourus, il vous est fortement recommandé d’être assisté et défendu par un avocat spécialiste en droit pénal

Doranges Avocat
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