Comprendre la responsabilité pénale des élus en deux minutes

I – LA NOTION D’ÉLUS

1.1. C’EST QUOI UN ÉLU ?

Un élu est une personne investie d’un mandat électif, confié par les citoyens dans le cadre d’une élection démocratique.

En tant que représentant du peuple, l’élu exerce une autorité publique et participe à la gestion de la chose publique, au niveau local, national ou européen. Il tire sa légitimité du suffrage universel, direct ou indirect, et doit respecter les principes de neutralité, d’impartialité, de probité et de légalité.

En tant que décideur public, l’élu se doit d’être au service de la loi et de respecter la loi.

1.2. LES DIFFÉRENTS ÉLUS

Il existe différentes catégories d’élus selon le niveau de collectivité ou d’institution auquel ils appartiennent :

II – LE CADRE JURIDIQUE DE LA RESPONSABILITÉ PÉNALE DES ÉLUS

La responsabilité pénale des élus est encadrée par un ensemble de règles qui visent à protéger l’ordre public, garantir la probité et préserver la confiance des citoyens dans leurs institutions.

2.1. LE FONDEMENT DE LA RESPONSABILITÉ PÉNALE DES ÉLUS

Conformément aux dispositions de l’article 121-1 du Code pénal, le principe est que la responsabilité pénale est personnelle.

La responsabilité pénale de l’élu découle également de ce principe.

Un élu peut donc être poursuivi à raison d’infractions commises dans l’exercice de ses fonctions.

Autrement dit, l’élu ne peut pas être considéré comme jouissant d’une irresponsabilité pénale liée à son statut ou à ses fonctions.

2.2. LES PRINCIPALES INFRACTIONS PÉNALES LIÉES AUX ÉLUS 

Les infractions d’imprudence et de négligence

Les élus peuvent être poursuivis pour des infractions non intentionnelles lorsqu’ils ont, par exemple, omis de prendre les mesures nécessaires pour prévenir un danger.

Les délits d’atteinte à la probité

Ce sont les infractions pénales pour lesquelles les élus sont le plus souvent poursuivis et condamnés.

La prise illégale d’intérêts 

Cette infraction est prévue à l’article 432-12 du Code pénal, est le fait, notamment par un élu, de prendre, recevoir ou conserver, directement ou indirectement, un intérêt de nature à compromettre son impartialité, son indépendance ou son objectivité dans une entreprise ou dans une opération dont il a, au moment de l’acte, en tout ou partie, la charge d’assurer la surveillance, l’administration, la liquidation ou le paiement.

Le détournement de fonds publics

Ce délit est prévu à l’article 432-15 du Code pénal et consiste dans le fait, notamment par un élu ou l’un de ses subordonnés, de détruire, détourner ou soustraire un acte ou un titre, ou des fonds publics ou privés, ou effets, pièces ou titres en tenant lieu, ou tout autre objet qui lui a été remis en raison de ses fonctions ou de sa mission.

Si vous souhaitez en savoir davantage sur le détournement de fonds publics, vous pouvez lire ici notre article consacré à ce délit.

Le favoritisme

Prévu à l’article 432-14 du Code pénal, ce délit consiste dans le fait, notamment pour un élu ou par toute personne agissant pour le compte d’un élu, de procurer ou de tenter de procurer à autrui un avantage injustifié par un acte contraire aux dispositions législatives ou réglementaires ayant pour objet de garantir la liberté d’accès et l’égalité des candidats dans les marchés publics et les contrats de concession.

La corruption

Si vous souhaitez en savoir davantage sur le délit de corruption, vous pouvez lire ici notre article qui y est consacré.

La concussion

Ce délit est prévu à l’article 432-10 du Code pénal et consiste dans le fait, notamment pour un élu, de recevoir, exiger ou ordonner de percevoir à titre de droits ou contributions, impôts ou taxes publics, une somme qu’il sait ne pas être due, ou excéder ce qui est dû.

III – LA RESPONSABILITÉ PÉNALE FACE À L’IMMUNITÉ DE CERTAINS ÉLUS

La responsabilité pénale des élus, bien que fondée sur le principe d’égalité devant la loi, connaît des tempéraments spécifiques pour certains élus.

3.1. RESPONSABILITÉ PÉNALE ET IMMUNITÉ PARLEMENTAIRE 

L’immunité parlementaire est prévue à l’article 26 alinéa 2 de la Constitution.

Aucun membre du Parlement ne peut faire l’objet, en matière criminelle ou correctionnelle, d’une arrestation ou de toute autre mesure privative ou restrictive de liberté qu’avec l’autorisation du bureau de l’assemblée dont il fait partie. Cette autorisation n’est pas requise en cas de crime ou délit flagrant ou de condamnation définitive.

La détention, les mesures privatives ou restrictives de liberté ou la poursuite d’un membre du Parlement sont suspendues pour la durée de la session si l’assemblée dont il fait partie le requiert”.

Cette immunité vise à protéger le parlementaire contre d’éventuelles mesures de pression politique ou judiciaires. Elle ne s’applique qu’aux infractions commises en dehors de l’exercice de ses fonctions parlementaires.

L’autorisation du Bureau de l’Assemblée nationale ou du Sénat est requise uniquement pour des mesures coercitives (arrestation, placement en garde à vue, contrôle judiciaire). En revanche, l’ouverture d’une enquête ou une mise en examen peuvent être décidées sans autorisation préalable, sauf si une mesure privative de liberté est ordonnée.

L’immunité parlementaire ne fait pas obstacle à une poursuite pénale, ni à un procès. Elle retarde simplement l’exécution de certaines mesures contraignantes. Elle ne saurait constituer un obstacle à l’exécution des décisions de justice définitives.

3.2. RESPONSABILITÉ PÉNALE ET IMMUNITÉ DES DÉPUTÉS EUROPÉENS

Les députés européens bénéficient, dans l’exercice de leur mandat, d’un régime d’immunité spécifique, distinct de celui prévu pour les députés et les sénateurs.

Cette immunité est régie par le droit de l’Union européenne et codifiée dans plusieurs textes fondamentaux.

Le régime de l’immunité des membres du Parlement européen  est défini par l’article 9 du Protocole n° 7 sur les privilèges et immunités de l’Union européenne qui prévoit que “pendant la durée des sessions du Parlement européen, les membres de celui-ci bénéficient:

a) sur leur territoire national, des immunités reconnues aux membres du parlement de leur pays,

b) sur le territoire de tout autre État membre, de l’exemption de toute mesure de détention et de toute poursuite judiciaire.

L’immunité les couvre également lorsqu’ils se rendent au lieu de réunion du Parlement européen ou en reviennent.

L’immunité ne peut être invoquée dans le cas de flagrant délit et ne peut non plus mettre obstacle au droit du Parlement européen de lever l’immunité d’un de ses membres“.

3.3. RESPONSABILITÉ PÉNALE ET IMMUNITÉ PRÉSIDENTIELLE 

Le Président de la République bénéficie d’un régime constitutionnel spécifique défini aux articles 67 et 68 de la Constitution.

L’article 67 de la Constitution dispose ainsi que :

“Le Président de la République n’est pas responsable des actes accomplis en cette qualité, sous réserve des dispositions des articles 53-2 et 68.

Il ne peut, durant son mandat et devant aucune juridiction ou autorité administrative française, être requis de témoigner non plus que faire l’objet d’une action, d’un acte d’information, d’instruction ou de poursuite. Tout délai de prescription ou de forclusion est suspendu.

Les instances et procédures auxquelles il est ainsi fait obstacle peuvent être reprises ou engagées contre lui à l’expiration d’un délai d’un mois suivant la cessation des fonctions.”.

Le Président de la République reste responsable devant la Cour pénale internationale pour les crimes relevant de sa compétence (génocide, crimes contre l’humanité).

L’immunité dont jouit le Président de la République n’exclut pas une poursuite pénale après la fin du mandat, si les faits sont constitutifs d’infractions.

IV – LA RÉFORME ENVISAGÉE DE LA RESPONSABILITÉ PÉNALE DES ÉLUS

Au mois de mars 2024, Christian VIGOUROUX – Président de section honoraire du Conseil d’État – a été sollicité par le Premier Ministre afin qu’il étudie les pistes permettant de lever les freins à l’action publique s’agissant des élus.

Dans son rapport intitulé “Sécuriser l’action des autorités publiques dans le respect de lalégalité et des principes du droit”, Christian VIGOUROUX liste ainsi trente-six propositions.

Certaines propositions visent à limiter les cas où il est possible d’engager la responsabilité pénale des élus

Le rapport constate que de nombreux élus renoncent à agir par crainte de poursuites pénales. La prise illégale d’intérêts, notamment, est perçue comme une infraction trop large et trop sévère, pénalisant même les comportements de bonne foi.

Selon ce rapport, la priorité doit être donnée aux infractions telles que la corruption, les détournements volontaires, ou les atteintes aux libertés. En revanche, les manquements sans intention frauduleuse, comme certaines erreurs dans les marchés publics, devraient faire l’objet d’un traitement moins répressif.

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Vous êtes titulaire d’un mandat électif et il vous est reproché d’avoir commis une ou plusieurs infractions pénales ? Face à une pénalisation croissante de la vie publique et de la vie polique, il est fortement recommandé de vous rapprocher d’un avocat spécialiste en droit pénal afin de pouvoir bénéficier de précieux conseils et d’une défense de qualité à tous les stades de la procédure : garde à vue, perquisitions, mise en examen, audience correctionnelle. 

En sa qualité d’avocat pénaliste, Maître Grégory DORANGES est non seulement en mesure de vous défendre face aux acteurs de la procédure pénale mais également de vous aider à défendre efficacement votre image et votre réputation durant toute la procédure pénale.

Doranges Avocat
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